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Détail de la contribution

Auteur: Sara MERLINO

Titre:
Séquences de traduction spontanée et phénomènes de contact de langues


Abstract/Résumé: Dans cette contribution, nous nous intéressons à des séquences de traduction spontanée qui se produisent au sein d’interactions plurilingues de type professionnel. Bien que dans ces contextes les locuteurs interagissent généralement en anglais lingua franca, il arrive souvent que, au fil de l’interaction, d’autres langues soient rendues disponibles : des alternances codiques sont en effet produites de manière marquée, suivies par la production du même contenu dans la langue de l’interaction et accompagnées par des commentaires métadiscursifs qui montrent un travail de comparaison effectué par les participants entre la langue de l’interaction et d’autres langues qui composent le répertoire plurilingue sous-jacent. Nous proposons de traiter ces moments, voire ce type particulier d’alternances codiques que sont les traductions spontanées, comme lieu d’observation de la manière dont les locuteurs s’orientent vers le contact de langues, catégorisent les ressources linguistiques et les langues de l’interaction (cf. Mondada, 2000) et évoquent la différence linguistique à toutes fins pratiques. Comme il a été montré dans la littérature, la traduction spontanée ou naturelle (Harris, 1977) peut concerner des applications locales et occasionnelles (cf. le continuum de Müller, 1989) qui sont finalisées non seulement à la gestion de la différence linguistique, mais aussi à la réalisation d’autres finalités pratiques (v. De Stefani et al., 2000 ; Margutti, 2007 ; Greer, 2008). Les séquences de traduction que nous examinons ici peuvent concerner des recherches lexicales mais aussi des productions du locuteur qui tracent des liens conceptuels et lexicaux à travers les langues : ces liens s’établissent non seulement par la production d’un mot dans une autre langue, explicitement catégorisé en tant que tel, mais aussi par la production progressive d’une traduction qui « calque » la forme « de départ » et introduit une relation de proximité entre les langues et les formes en question. Dans d’autres cas, au contraire, les locuteurs peuvent faire appel à une absence d’équivalences entre langues et invoquer la nature « intraduisible » de certains items. En adoptant une perspective praxéologique et conversationnelle sur les phénomènes de contact (cf. Auer, 1984 ; Lüdi, 1987; De Pietro, 1988 ; Firth, 1990 ; Gardner et Wagner, 2004 ; Mondada, 2004 ; Auer et Wei, 2007), nous contribuons à une vision émique de ces phénomènes et nous rendons compte des processus de co-construction de la différence linguistique telle qu’elle émerge dans les pratiques des locuteurs au sein de ces séquences de traduction. L’analyse s’appuie sur nombreuses heures d’enregistrements audio et vidéo de réunions de travail ayant lieu dans différents contextes internationaux.